MON BEAU SAPIN

ARBRE MYSTÈRE

Cet étrange conifère ne peut qu’interpeller les promeneurs du parc de La Tête d’Or.

On croirait qu’il sort de son lit, tête hirsute et vêtements non repassés. Bref, il n’a pas eu le temps de se préparer pour se montrer en public.

Le vent l’a-t-il trop secoué un jour de tempête ?

Peut-être que, délibérément, cet arbre cherche à nous provoquer ou à nous enseigner l’humour, non comme un outil de rébellion mais comme une approche de la vie.

Que cache-t-il sous ses branches ?

Un monstre, un être loufoque aux chaussures trouées qui s’amuse, la nuit, sur la pelouse ?

Il ne ressemble ni aux beaux musiciens, ni aux vieilles demoiselles, ni aux médecins divaguant, et ni aux astrologues coiffés de bonnets pointus d’Apollinaire.*

Abrite-t-il quelque oiseau frileux ? Une famille d’écureuils ?

D’où lui viennent ces cornes ? D’une volonté de se démarquer de ses congénères ?

Il est possible aussi, que fort de l’expérience du Petit Sapin d’Andersen, qui finit  dans un coin où on l’oublia, il garde volontairement cette allure brouillonne pour échapper aux fêtes et continuer de jouir du grand air et du bon soleil quand il en était encore temps. **

Les jardiniers et paysagistes du Parc se sont-ils attardés devant lui pour se demander comment ils allaient le traiter ?Ont-il délibéré sur son sort ?

Si oui, ils ont eu bien raison de le laisser pousser naturellement et d’accepter son originalité.

Au-delà de son allure burlesque, cet arbre nous renvoie l’image d’une nature qui a le droit de vivre comme elle se présente, sans suivre des codes de l’esthétique inventés par les hommes.

Loin du conformisme, il nous invite

aux rêves,

à la fantaisie,

à la création.

* Images empruntées au poème d’Apollinaire : Les Sapins

**citations extraites de La méthode Boscher ou les journées des tout petits page 69